Cette augmentation a déclenché des protestations parmi les agriculteurs espagnols, qui appellent l’Union européenne à faire respecter les arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) concernant le Sahara occidental. Selon les données officielles de la Fédération espagnole des associations de producteurs et exportateurs de fruits, légumes, fleurs et plantes vivantes (FEPEX), l’Espagne a importé pour 672 millions d’euros de produits agricoles marocains au cours des quatre premiers mois de 2025. À mi-année, ce chiffre atteignait 899,5 millions d’euros, soit une hausse de 33 % par rapport à la même période en 2024. En valeur, le Maroc est devenu le premier fournisseur de l’Espagne dans le secteur des fruits et légumes. Si la France reste le premier fournisseur en volume, le Maroc réduit rapidement l’écart.
Les tomates constituent un point particulièrement sensible : au cours de la dernière décennie, les importations espagnoles de tomates marocaines ont bondi de 269 %, passant de 18 045 tonnes en 2014 à 66 624 tonnes en 2024. Dans le même temps, les exportations espagnoles de tomates vers l’UE ont chuté de 25 %. Les agriculteurs dénoncent une pression accrue sur la production locale et une perte de parts de marché. Les associations agricoles espagnoles expriment également leurs inquiétudes concernant le manque de contrôle sur le système de prix d’entrée aux frontières, en particulier pour les tomates. Elles demandent à Bruxelles de renforcer la surveillance afin d’éviter toute irrégularité potentielle.
Le débat revêt aussi une dimension politique et juridique liée à l’origine des produits issus du Sahara occidental. Les représentants sahraouis affirment que les productions agricoles de ce territoire sont commercialisées dans le cadre des accords commerciaux marocains, soulevant des questions sur l’exploitation des ressources naturelles et sur le respect des arrêts de la CJUE, qui exigent que les produits du Sahara occidental soient exclus des préférences commerciales UE-Maroc, sauf consentement explicite du peuple sahraoui et de son représentant, le Front Polisario. La question a été portée devant la Commission des pétitions du Parlement européen, à la suite des interventions des eurodéputées Carmen Crespo (Parti Populaire) et Mireia Borrás (Vox). Toutes deux réclament un renforcement du contrôle du système de prix d’entrée et une application stricte des accords commerciaux entre l’UE et le Maroc. Carmen Crespo a qualifié la situation de « déséquilibre inacceptable » qui affecte les agriculteurs du sud de l’Espagne. La CJUE a annulé les accords de pêche et d’agriculture entre l’UE et le Maroc en octobre 2024, au motif qu’ils ne bénéficiaient pas du consentement du peuple sahraoui — une décision réaffirmée en janvier 2025.
La Cour a précisé que les produits originaires du Sahara occidental doivent être exclus des préférences commerciales européennes et étiquetés comme tels. Ce débat persistant illustre l’intersection entre commerce, concurrence et respect du droit international, alors que producteurs et responsables politiques réclament à la fois des conditions de marché équitables et le respect des décisions de justice européennes.